La responsabilité médicale pénale

 

Responsabilité médicale pénale - Position actuelle des tribunaux en Belgique

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La mise en cause de la responsabilité d’un médecin suppose qu’il ait commis une faute dans l’exercice de sa profession.

La mise en cause peut se situer sur le plan civil ou pénal.

Le présent article reprend, en se fondant sur des décisions de jurisprudence et de la doctrine, la position des cours et tribunaux belges sur la question de la responsabilité pénale médicale.

(JLMB 1997, p.1075, rev. dr. santé 1996-97, p.182).

«La responsabilité professionnelle du médecin s’étend à sa faute la plus légère, laquelle doit être appréciée en fonction du comportement d’un praticien normalement compétent, attentif et prudent placé dans les mêmes circonstances » ;


(Appel LIEGE, rev. rég.dr 1979, p.906)

«Sans s’immiscer dans un domaine dans lequel il ne dispose pas de connaissances suffisantes, force est au juge de constater, comme l’admettent la doctrine et la jurisprudence, que l’erreur contraire à des données médicales certaines, démontrant une ignorance ou une négligence caractérisée, incompatible avec le critère du médecin diligent et avisé, constitue la faute la plus légère dont le médecin doit rendre compte »

(Le droit médical , Y-H LELEU, G.GENICOT, DE BOECK, n°122)

« Le médecin « modèle » avec lequel la comparaison doit être effectuée doit être le médecin de la spécialité requise par l’acte médical pratiqué, disposant des mêmes compétences approfondies et de la même pratique régulière. »

La faute commise par le médecin peut être sanctionnée pénalement ou civilement par les Tribunaux de l’Ordre judiciaire.

Pénalement, cette faute peut être constitutive
- de coups et blessures involontaires (art.418 du code pénal)
- d’homicide involontaire (art.419 du code pénal)
- de non assistance à personne en danger. (art. 422 bis du code pénal)

C’est cependant toujours la même notion de faute qui sous-tend ces responsabilités.
La faute la plus légère est retenue.

 

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Protection du patient

(loi du 22 août 2002)

 

 

« Le patient a droit à la prestation de service de qualité répondant à ses besoins » (article 5 de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient).

Droit médical, CUP 2005, Yves-Henri LELEU, p. 19. :

« Le patient a droit à des soins de santé efficaces, vigilants, de qualité et conformes aux données actuelles et acquises de la science médicale »

Aux termes de l’article 34 du Code de déontologie médicale, le médecin s’engage à donner au patient des soins attentifs, consciencieux et conformes aux données actuelles et acquises de la science médicale.

De façon générale, la jurisprudence considère notamment que:

« le médecin commet une faute lorsqu’il ne pratique pas ou n’ordonne pas les examens qui permettraient de déceler l’origine des maux dont souffre son patient, et que ces carences sont incompatibles avec le critère du médecin normalement diligent et avisé » (Mons, 13 décembre 1983, rev.rég.dr.1984, p.175)

 

Porter attention au patient en tant qu'être humain!

Evocation

 

La doctrine souligne l’importance de porter attention au patient en tant qu’être humain.

« Le médecin qui veut effectuer certains tests de diagnostic doit être conscient en premier lieu qu’il ne traite pas une maladie en soi mais un patient, un être humain dans son ensemble. Ceci signifie que le médecin doit tenir compte des limites et conséquences possibles de certains tests de diagnostic ou d’un certain traitement sur l’ensemble de la constitution du patient.
Ainsi des tests de diagnostic ou pré-opératoires ne peuvent pas toujours rester simplement limités aux endroits douloureux pour le patient ou à l’organe à opérer. Un médecin ne peut pas se contenter p.ex. de prendre seulement des radiographies d’un dommage au genou clairement constatable chez un patient touché grièvement par un accident de vélomoteur. Il doit savoir que, lors de tel accident, des dommages à la hanche ne sont aucunement exclus, que lors d’une fracture de l’os long, l’os concerné doit toujours être photographié sur toute sa longueur, surtout qu’une hémorragie très importante avait été constatée dans la cuisse droite »
(La responsabilité médicale civile du médecin et de l’hôpital, T.VANSWEEVELT, BRUYLANT, 1996, n°190)

L’absence de recours aux examens nécessaires est constitutive de faute ;

(Corr. Bruxelles 17/12/1967, inédit, RG n° 1705)

« En l’espèce , un enfant de 6 ans, pris d’agitation et de vomissements à la suite d’une chute sur la tête fut présenté à la consultation de chirurgie de la clinique C. de P. à BOITSFORT (BRUXELLES). Après divers examens, le médecin de famille consulté décida de faire hospitaliser l’enfant. Le médecin de garde en chirurgie, le prévenu L., diagnostiqua sans examen approfondi une commotion cérébrale légère et ordonna un repos complet en chambre noire sous surveillance d’une infirmière. Au cours de l’après – midi, vers 15 heures, une infirmière prit la température, puis une aide passant vers 19h .45 constata le décès. Vers 16 h. le chirurgien L. avait entrebaîllé la porte et l’enfant lui avait paru endormi. Or, selon les experts, c’est vers cette heure là que le petit patient entra dans le coma.
Le rapport des experts fut très sévère. Il établit que l’hématome extradural provoqué par la rupture d’un vaisseau, n’aurait pas entraîné la mort de l’enfant s’il avait été décelé à temps par divers examens médicaux alors que les symptômes auraient dû faire suspecter l’état réel de l’enfant…
Le tribunal reprocha au chirurgien « son incroyable manque de conscience professionnelle et sa négligence coupable dans l’exercice de son art, pour n’avoir procédé à aucun examen, ni rédigé aucune note de garde et n’avoir donné aucune directive précise sur les modalités de la surveillance au personnel infirmier »

Encore faut-il également que le médecin qui prescrit un examen en analyse effectivement et attentivement les résultats !

 

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Quelle sanction pour une faute médicale?

 

 

Même si la faute la plus légère suffit pour engager la responsabilité du médecin, la gravité de la faute est prise en compte pour décider de la hauteur de la sanction puisque celle-ci a pour but de protéger la société contre des manquements qui la mettent en péril (dans le cas de responsabilité médicale par l’atteinte à l’intégrité physique ou à la vie d’autrui), de prévenir des récidives et de sanctionner l’auteur des faits.


( Appel Liège, 23/12/1997, RGAR 1999, 13168)

« Attendu qu’eu égard à la gravité des fautes commises et à leurs conséquences fatales, il n’y a pas lieu de faire bénéficier le prévenu de circonstances atténuantes ;

Attendu que les taux et nature des peines à prononcer tiendront compte de ces critères de même que de la nécessité de faire comprendre au prévenu, qui paraît n’en avoir toujours pas conscience, de la nécessité de prendre toutes mesures utiles, s’agissant de la vie de patients, à assurer, par tous les moyens disponibles, la certitude de son diagnostic, de manière à éviter toute conséquence néfaste, voire fatale comme en l’espèce »


La sanction sera également influencée par les antécédents spécifiques du condamné : par antécédents spécifiques, il faut entendre des décisions - avec verdict de culpabilité - qui ont déjà sanctionné des infractions ressortant du même domaine, en l’espèce des manquements professionnels.

Il est également intéressant de relever qu’en France, les juridictions pénales ajoutent à la sanction pénale des interdictions - temporaires ou définitives, partielles ou totales - d’exercer la profession médicale.

 

Au sujet du délit de non assistance à personne en danger

Evocation

 

Du délit spécifique de non assistance à personne en danger. (art. 422 bis du Code pénal).

Ce délit vise l’abstention coupable de porter secours à une personne en danger.

De la part d’un médecin qui a fait serment de consacrer son activité à sauver des vies, c’est sans doute le manquement le plus révoltant, d’autant que le patient est totalement impuissant face à cette absence de soins indispensables. L’abstention d’un médecin à se rendre auprès d’un patient afin de procéder à un examen clinique, et dès lors l’ignorance de la gravité de l’état pour cette raison, n’est nullement une cause de justification :


( Conseil de guerre, 5 juillet 1977, RGAR 1979, n° 10009 et 10064).

« En refusant de se rendre sur place pour examiner un blessé, le médecin se met dans l’impossibilité d’apprécier la gravité de son état et se rend coupable du délit d’abstention de porter secours à personne en danger. L’article 422 bis du Code pénal s’applique particulièrement aux médecins, le fait de porter secours à personne en danger constituant une obligation propre à leur profession »

Les manquements à la déontologie médicale sont sanctionnés par l’Ordre des Médecins : la procédure obéit à des règles spécifiques, notamment le secret .
Des fautes sanctionnées pénalement peuvent constituer également des manquements aux obligations déontologiques des médecins mais il existe également des manquements déontologiques spécifiques.

 

 
 
 
Dernière mise à jour : 26/08/2013
 
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